Jeanne Dortzal


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Les journaux

Jeanne DORTZAL

Les journaux

J'ai rassemblé une grande partie des articles de presse se rapportant à Mlle Jeanne Dortzal après recherches dans la B.N.F.

Annales africaines. Revue hebdomadaire de l'Afrique du Nord. 1904.

Le credo sur la montagne, par Jeanne Dortzal. (En vente chez l'auteur, 140 bis rue de Tocquevilie, Paris (17e).

Jeanne Dortzal est une des femmes les plus sensibles qui soient, Il y a en elle une profondeur étrange de l'émotion. Il semble qu'elle soit tout cœur et toute âme. Elle vit dans la passion comme d'autres, entendez, la plupart des autres poètes, dans la littérature. Du haut de ses châteaux intérieurs elle contemple le drame cosmique et sait que la raison de ce drame est en elle. Elle voudrait s'élever aux effusions les plus audacieuses de la mystique, et pleure d'être enchaînée à la vie la plus cruelle. Eblouie, attirée vers la beauté imminente par une ardeur de tendresse qui tient aussi du vertige, elle se réfugie dans la chapelle et pousse le vitrail :


J'ai regardé le ciel que l'étoile a tissé ;
Le chariot divin, de son souffle immobile,
Buvait l'or des minuits, et le Christ a passé
Entre la terre et l'homme, et le Christ était l'île
Où s'amarre le ciel que l'étoile a tissé.

Gardienne du trésor, j'ai poussé le vitrail ;
Entre la rose et l'olivier, j'ai fait le signe
De la croix ; le silence enroula son corail.
A mes mains, et debout, sous ma robe de cygne,
Gardienne du trésor, j'ai poussé le vitrail.

O nuit de Bethléem dont le souffle descend
Pour s'étager en nappe d'or ; ô blonde hostie,
Communion pascale où la myrrhe et l'encens
Soulignent la clarté dont l'âme est investie,
O nuit de Bethléem et musique du sang.


Face à l'éternité, l'étoile, et quel cri bleu !
L'Espérance a remis sa couronne d'épines ;
Suis-je en état de grâce, ayant vu passer Dieu,
Ou dols-je remonter sur les mêmes collines
Face à l'éternité d'où monte ce cri bleu ?

Dans toute femme aimante il y a un peu de l'esprit de Ste-Thérèse. Mais il est rare que des accents d'une telle sincérité, si vécue, si personnelle, se fassent entendre au banquet de la poésie.
La joie pathétique que l'on éprouve à lire les vers de Jeanne Dortzal s'accroît lorsqu'on l'entend les réciter. Je n'oublierai jamais les moments exquis que je passai à son studio du boulevard Péreire, où fréquentaient maintes notabilités des lettres, de l'art et du théâtre, et l'émotion qui s'emparait de nous lorsque, sans vains efforts de déclamation, elle récitait de belles strophes. De Pierre Bonardi, bel écrivain et noble caractère, à Henri Jacques, auteur de cette Symphonie héroïque, qui fut l'admirable poème de la guerre, tous, la main sur le front, se sentaient transportés par l'harmonie du verbe dans un univers où l'être n'est plus qu'un rêve qui se révèle à soi-même.

Robert RANDAU.

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PRIX NATIONAL DE POÉSIE

Le prix a été attribué cette année à Jacques Noir, par huit voix sur quinze votants, pour son livre des
Heures Profondes. Notre compatriote, Mme Jeanne Dortzal, native de Tlemcen, n'a obtenu que deux voix pour sa Croix de Sable. Mais il paraît que cette Croix de Sable, d'un granit plus durable que la fuite des Heures, même profondes, aurait dû emporter tous les suffrages, s'il n'entrait 'pas, dans les concours poétiques, des considérations tout à fait étrangères à la poésie.


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JEANNE DORTZAL

Les "Editions du Monde Nouveau " viennent de publier de Mme Jeanne Dortzal, une Tlemcénienne déjà entrée toute vive dans la notoriété parisienne, un amour de petit livre : Il était une fois...
Avec le dessin en couleur de la couverture signé : Albert Uriel et une demi-douzaine d'autre croquis du même artiste, à la fois ingénus et raffinés, ce petit volume mériterait, tant il est plaisant à l'œil, une place de choix sur les rayons préférés d'un bibliophile, alors même que, sans valeur littéraire, il ne donnerait que la joie des yeux à l'amateur de beaux livres,\ mais il se trouve que cette fine coupe de cristal de Bohême, est pleine d'une liqueur choisie.
"Il était une fois... " contient cent petits poèmes de quinze à soixante lignes. Est-ce de la prose ou des vers? Si ce sont des vers, ils bousculent toutes les règles de la versification, puisque en fait de rimes, ils se contentent de vagues assonances.
Ce ne sont donc pas des vers dans le sens classique du mot ; je me garderai de dire que c'est de la prose. Est-ce de la poésie? Je le crois et la vraie, de celle qui vous arrache aux rudesses aux trivialités du réel pour vous bercer dans des songeries sans fin et vous emporter vers ce pays chimérique dont seuls les poètes peuvent vous ouvrir les portes.
Ce genre ne s'analyse pas ; cherche-t-on à analyser le parfum d'un bouquet d'œillets ? ou à étudier l'anatomie d'un martin-pêcheur dont le vol rapide coupe d'un trait de feu l'eau morte d'un étang ?
De tel ou tel de ces poèmes qui paraissent enfantins et puérils, se dégage parfois, une sorte d'angoisse nostalgique, comme si en ouvrant brusquement le passé, il en sortait des figures oubliées, presque aussitôt évanouies qu'apparues.



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L'Afrique du Nord illustrée : journal hebdomadaire d'actualités nord-africaines : Algérie, Tunisie, Maroc. 1907-1939


CHRONIQUE DE LA SEMAINE

Paris et l'Afrique du Nord. La Muse de Tlemcen : Mme Jeanne Dortzal.
Paris a, cette semaine, fêté dignement l'Algérie. Est-ce pour se consoler du froid bonnet de brume dont le coiffe la saison ? Est-ce pour reculer vers plus d'azur et vers plus de lumière l'horizon de ses avenues, bâillonnées d'un brouillard couleur de plomb et sourdement taciturnes ?...
Avenue Daubigny, dans la coquette salle de " la Flamme", M. Raoul Stoupan a parlé de notre terre d'or. Il en a excellemment décrit les mirages. Et les grandes ombres d'Isabelle Eberbardt, du père de Foucauld, du général Laperrine ont, un moment, erré sur la foule attentive. Une femme, un prêtre, un soldat, tous trois victimes de leur passion pour notre Sud ensorceleur ont, tout à tour, reçu l'hommage de cette assistance éprise des mêmes magies. Et, dans l'ombre propice de la salle où la victoire sans tête battait éperdument des ailes, nous avons tous communié dans une même ferveur.
M. Raoul Stoupan a dit encore son admira- lion pour notre littérature africaine. Et nous avons entendu des proses et des poèmes des treize poètes algériens. Mme Jeanne Dortzal, - muse et inspirée à la fois, - vint réciter ses propres poésies. Il parut alors qu'un rayon de soleil illuminait, hors de l'ombre glacée, le visage extasié de celle qu'il faut appeler la muse de Tlemcen, de celle qui a chanté, avec tant d'émotion et de grâce, les jardins d'El-Kalaah, les rosiers du Sud, les jets d'eau, les fontaines. J'évoquais ce livre récent les Versets du Soleil (1) où se donne si passionnément le cœur de Jeanne Dortzal. On y rencontre le vieillard aveugle et paré de jasmin, le berger du Sud, le muezzin, la sorcière. Un Irait de plume suffit pour peindre le marché arabe où des épluchures d'or bougent dans les ruisseaux, la médersa où des hommes portant à leur turban le mépris et l'audace viennent, contre un jet d'eau, méditer sur la mort, le bain maure d'où s'élève

Une odeur de chacal et de roses crevées.

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" LES VERSETS DU SOLEIL " par JEANNE DORTZAI.

La littérature féminine l'emporte ordinairement sur la production littéraire des hommes par la nouveauté, la fraîcheur et la puissance inattendue des sensations. Les femmes écrivent comme elles sentent, aussi se distinguent-elles particulièrement quand il s'agit de rendre tout ce qui frappe leur sens ou leur coeur.
Voici un livre éclatant de couleurs et de lumière, vibration ininterrompue. L'auteur, Jeanne Dortzal. Nous transporte au pays du soleil. Impression suggérée par l'étrange dessin qui orne la couverture, il semble, dès les premiers feuillets, que l'on passe le seuil d'une voûte sombre pour entrer dans l'atmosphère chaude et alourdie de parfums du pays d'Islam.
Jeanne Dortzal a vraiment senti la terre arabe. Elle ne voit pas l'Orient, le Sud, à travers les fadaises littéraires, les poncifs d'école qui n'ont aucun rapport avec la réalité. Ses paysages ne sont pas conventionnels, léchés, bien ratissés comme des illustrations de légende. Ils crient. Ils flambent, et si parfois la langue s'égare, si parfois une expression trop hardie, trop osée, heurte, choque l'usage commun, c'est que, dédaigneux du coup de pinceau réfléchi, l'artiste inspiré a écrasé le tube de couleur sur la toile. De près, ce ne sont que rugosités et placages. De loin, cela chante, cela vibre, cela vit. L'art de Jeanne Dortzal est à la fois brutal et barbare.
On glane, au hasard, de beaux vers bien frappés, purs et nets comme des médailles :

Les voûtes d'un jardin lourdes de tourterelles...
La chaleur piaffant comme un chenal arabe,
Ciel béant assourdi par les eucalyptus...
Silence en fusion coupé par les shoughis...
... et du soleil entre les dents,
Un burnous en haillons sur ses reins de panthère,
Blidah, fille du Sud, rose du Ramadan,
Debout, comme une idole, en face de ma terre...



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Mme Jeanne Dortzal, auteur des Versets du Soleil.

Et voici Tlemcen, le Marché arabe, le Café maure, Cristel, le Hammam et cette admirable pièce la Sorcière...
Il faudrait pouvoir donner des citations pour rendre l'impression de ce livre ardent, voluptueux, violent où sont condensées des sensations sincères qui frappent l'imagination du lecteur, et, chantant comme des versets, font d'elle
Une immense oasis où roulent des prières...


P. Berch


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Le XIXe siècle (Paris. 1871). 1902/10/04.

PREMIÈRES REPRÉSENTATIONS

Odéon. - Monsieur le Directeur, cette charmante comédie de MM. Bisson et Fabrice Carré, dont on se rappelle le si franc succès au Vaudeville, vient pleinement de réussir à l'Odéon. Nous ne raconterons point de nouveau la fabulation spirituelle : on se souvient qu'il s'agit, en l'espèce, du bon tour que joue à certain directeur de l'administration centrale, - lequel n'accorde ses faveurs à ses employés qu'autant que les femmes de ceux-ci, si elles sont jolies, lui accordant les leurs - la belle-sœur d'un modeste employé rêvant une sous-préfecture.
M. Noblet, créateur du rôle, l'a repris hier, et se montre toujours aussi finement comique ; Mme
Mitzy-Dalli, succédant à Mme Sisos, fait preuve de talent ; à côté de ces deux protagonistes, il serait souverainement injuste de ne pas citer MM. Albert Lambert, d'un extrême savoureux sous les traits du vieux Bouquet, Coste, Siblol, Séverin et Mme Bonnet. N'ou- blions pas Mlle Dortzal qui, débutante, a fort gentiment joué le rôle de Gilberte. En résumé, plein succès.
En lever de rideau on nous avait donné le Record un alerte petit acte où l'on voit un sportman, habitué à collectionner les plus fameux records, se faire piteusement rouler par un simple botaniste, alors qu'il s'agit de gagner la main d'une jeune fille. Cette ouvrette de M. Thurner a été fort lestement jouée par MM. Dauvillers, Decœur, Louis-Marie, Mines Leyriss et Dematha.

F. L.

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La Muse française. Revue du mouvement poétique... ["Puis" Revue de la poésie]. 1923/01/10.

Il était une fois…, raconte Mme Jeanne Dortzal. Ce sont des impressions d'enfance, des contes enfantins mais, en même temps, philosophiques si j'ose dire ; c'est écrit en un style d'une savante naïveté, souvent très subtil. En somme un livre pour les grandes personnes surtout quand l'auteur évoque ses propres souvenirs de fillette et les enveloppe de regrets et de mélancolie. Dans un de ces poèmes, Mme Dortzal évoque un petit garçon avec lequel elle s'est promenée dans un jardin, et elle conclut :

Tu m'as pris la main, j'ai dit : viens-nous en !
Et j'ai vu trois choses :
Nous deux, une rose
Triste et un oiseau blanc.

Cette addition, arithmétiquement fausse et sentimentalement juste, est délicieuse. Seule une âme tendre de poétesse pouvait la faire.

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Les Annales politiques et littéraires : revue populaire paraissant le dimanche / dir. Adolphe Brisson. 1883-1939.

Voici, au contraire, une âme plus repliée sur elle-même, plus éprouvée sans doute par la vie, et qui, tantôt, s'examine dans la tristesse, cherchant sa lumière et sa voie, semblant, dans le passé et dans l'avenir, se redouter elle-même, ou qui, tantôt, au contraire, s'abandonne avec volupté aux plus hautes aspirations de son esprit et de son coeur. Tel, du moins, m'apparaît, à la lecture, l'auteur du Jardin des Dieux, Mme Jeanne Dortzal, dont, il y a quelques jours, on applaudissait, au théâtre de l'Œuvre, la ravissante féerie :
Perce-Neige et les Sept Gnomes. Son inspiration est étrange et diverse ; elle va de l'ironie mélancolique et même, çà et là, presque dure, à la tendresse la plus douloureuse ou la plus exquise. Aucune nature ne serait plus curieuse à analyser, telle qu'elle se montre dans un poème qui semble écrit, celui-là, au bord d'une mer septentrionale, aux premiers jours de l'automne, dans les alternatives de la tempête et de l'accalmie, quand on sent qu'il est temps de quitter la plage, de regagner, vers le sud, le calme du lac, le murmure de la forêt, le sourire: du ciel, et de rétablir en soi, pour jamais, la clarté, la paix et l'harmonie intérieures :

Le soleil a doré la cime des grands arbres,
Dans le jardin profond s'éveille un chant d'oiseau ;
Deux cygnes ; lentement, dans la blancheur des marbres,
Glissent ; l'aurore éclate et diaphane l'eau.
Elance-toi, mon âme, et va vers la lumière !
Prends tes ailes d'enfant, franchis l'espace bleu,
Et vers le ciel, où monte, ainsi qu'une prière,
Ton coeur, offre ton front à la pitié de Dieu.
Regarde autour de toi : chaque arbre a Bon histoire ;
Le plus vieux est resté debout malgré les ans ;
Des siècles ont passé dans sa longue mémoire ;
Ses branchages tordus font foi des ouragans ;
Malgré tout, il demeure, il frissonne, il verdoie,
Tout au printemps divin qui lui semble éternel,
Et qui pourtant, demain, emportera sa joie !
O mon cœur, sois semblable et te crois immortel !
Mon coeur, que chaque jour tes racines profondes
S'enfoncent dans le sol en dépit des douleurs !
Le sablier fatal te marque les secondes ;
Qu'importe ! Tu pleurais ? Les larmes sont des fleurs,
Elles tombent toujours sur la terre où l'on aime ;
Mais, va, leur chute encore est un enchantement.
Garde ton idéal au front comme un baptême,
Garde ton grand espoir au cœur, comme un serment !


J'ai voulu, par ces beaux vers, vous dédommager de tant de prose critique ; mais il me faut remettre encore au mois prochain de vous parler d'autres poétesses chez qui je pourrais cueillir toute une anthologie. Et que diraient les poètes qui, par force, attendront comme elles, s'ils n'étaient pas si galants ? Pourvu qu'ils le soient ! Je tremble... - Mais oui, j'en suis sûr, ils le sont.

AUGUSTE DORCHAIN.

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Le XIXe siècle (Paris. 1871). 1910/06/27. PROCES DE THEATRE

Mme Jeanne Dortzal avait écrit un acte intitulé Stenio, qui fut accepté par M. Bruel, président du "Cercle des Essayeurs ", l'auteur devant avancer la somme de 1.600 francs pour couvrir les frais de mise en scène.
La pièce ne pouvant être jouée à la date convenue, Mme Dortzal voulut reprendre son œuvre, mais M. Bruel s'y opposa ; d'où un procès en remboursement des 1.600 francs intenté par Mme Dortzal au président des "Essayeurs".
Après plaidoiries de Mes Georges Claretie et Husson, le tribunal a fait droit à la demande de Mme Dortzal.

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Le Figaro (Paris. 1854). 08/12/1904.

On nous signale, d'Anvers, le grand succès remporté par Mlle Jeanne Dortzal aux Variétés. Dans l'Etrangère, la jeune et brillante artiste a d'emblée conquis son public, et la presse locale a exprimé l'admiration du public. C'est ainsi que nous lisons chez un de nos confrères de là-bas "Dès son entrée, on la comprit très grande artiste et c'est à dessein que nous y insistons grande par la compréhension du rôle, par le souci consciencieux et perpétuel de le montrer dans son vrai jour, et grande surtout par son mépris total des effets faciles, torsions de mains, dérangements de coiffure et cris plus ou moins perçants."

Serge Basset.

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Journal des débats politiques et littéraires. 1814-1944.

COURRIER DES THEATRES

- A l'Odéon :
M. Ginisty vient de faire un excellent engagement, celui de Mlle Jeanne Dortzal, qui joua au Vaudeville, et qu'on a applaudie, cette année, chez Gémier. Cette jeune artiste est douée des qualités les plus sérieuses.

COURRIER DES THÉATRES

Les "Samedis littéraires et artistiques " de l'Odéon ont été repris hier à cinq heures. Le public était très nombreux. Cette première séance était consacrée à Florian. En une causerie alerte, M. Léo Claretie a parlé de l'homme et de l'œuvre, opposant celle-ci à celui-là, faisant ressortir leurs contrastes. L'œuvre de Florian contredit singulièrement sa vie. Cependant Florian n'est pas aussi absent de son œuvre qu'on l'a dit et M. Léo Claretie l'a prouvé avec verve. Des artistes de l'Odéon ont ensuite récité des fables et chanté des chansons. On a successivement applaudi Mlles Marcilly, Aubry, Dortzal Maille, M. Coste, Mlle Bady, Mmes Kesly et de Hally.
On a particulièrement goûté la manière spirituelle dont Mme Marcilly, qui a une excellente diction, a détaillé l
e Roi et les deux Bergers et le Chai et la Lunette, et l'intelligence très fine, le ton très juste, et la gentillesse originale avec lesquels Mlle Jeanne Dortzal, nouvelle venue à l'Odéon, a dit et "animé" deux des plus jolies fables de Florian : le Lapin et la Sarcelle et l'Habit d'Arlequin. Tous les autres récitants étaient des artistes connus du public, excepté Mlle Sylvie, premier prix de comédie du dernier concours du Conservatoire, qui a dit avec un naturel charmant la Tourterelle et la Fauvette.

PREMIERES REPRESENTATIONS

Odéon :
Iphigénie

L'Odéon a donné hier, en matinée, une représentation d'Iphigénie avec une interprétation nouvelle en grande partie. Cette représentation était précédée d'une conférence de notre collaborateur et ami M. Henri Chantavoine.
M. Henri Chantavoine a eu un succès exceptionnel. Non seulement, il a dit sur Racine, sur la psychologie de Racine, et sur les sources de cette psychologie, des choses charmantes et profondes non seulement, s'attachant à mettre en relief le personnage d'Eriphyle, - Eriphyle, a écrit Racine, "qui mérite d'être punie sans être tout à fait Indigne de compassion, - il a finement montré pourquoi elle semblait aux honnêtes gens du vingtième siècle plus digne de pitié que la tendre Iphigénie ; mais encore M. Chantavoine, par maints traits de spirituelle satire qui allèrent droit à leur but, a amusé et ravi son public. On lui a fait, à la fin, une ovation.
Iphigénie a été jouée d'une façon très inégale - sans aucune harmonie.
M. Albert Lambert père faisait Agamemnon. Quousque tandem ?... C'est vraiment trop de dévouement. Je pense qu'il se trouve à l'Odéon deux ou trois jeunes tragédiens qui ne demanderaient pas mieux que de s'essayer dans ce rôle. M. Albert Lambert père y manque de grandeur à un point !... Du père Bouquet à Agamemnon, il y a, n'est-ce pas, une petite distance !...
Mme Tessandier est bellement farouche en Clytemnestre. Mlle Brille prêtait sa beauté mâle à la malheureuse Eriphyle. Elle a bien composé le rôle, et malgré qu'elle n'y soit pas encore très assurée, on a vu qu'elle est réellement douée pour la tragédie. Mlle de Raisy est une Iphigénie ardente et touchante. Elle a eu d'excellents moments. Mais qu'elle s'applique à mieux rendre la musique des vers raciniens. Elle ne la rend pas quand elle dit :

Et je d'man'd'Achille à tout c'que j'vois

Et puis, qu'elle apprenne à se costumer ! J'ose écrire qu'hier elle était… fagotée. Elle pourrait demander des leçons à Mlle Dortzal qui, dans le petit rôle de la confidente Doris, nous est apparue délicieusement drapée, toute semblable à une statue grecque dont le visage serait celui de la Jeune fille du musée de Lille, - vous savez, ce buste de cire qu'on attribue à Raphaël. Mlle Dortzal a, du reste, dit avec justesse les courtes répliques de Doris…
Enfin, M. Dorival représente assez bien le bouillant Achille et M. Daumerie interprète Ulysse avec justesse. Mais dans l'ensemble, je le répète, cela est inégal, flottant.
Et il faudrait parler de la figuration… Mais cela m'entraînerait trop loin.

EDOUARD SARRADIN.

THEATRES

Echo de l'Odéon : c'est Mlle Jeanne Dortzal, la très jolie et très fine pensionnaire de M. Ginisty, qui a posé pour la délicieuse figure d'Euterpe qu'on voit dans le beau panneau décoratif de M. Dagnan-Bouveret, Apollon et les Muses, récemment marouflé dans une des salles de conférences de la nouvelle Sorbonne.

THEATRES

Vers d'une comédienne

C'est Une comédienne qui joue quelquefois… Son image, d'une grâce incomparablement fine, habite en Sorbonne - par la vertu du pinceau de M. Dagnan-Bouveret - sous l'apparence de la divine Euterpe. Ainsi, dit-on, son regard profond, mélancolique et mystérieux fascine les plus studieux des jeunes hommes…
Quand elle ne joue pas, Mlle Jeanne Dortzal, de l'Odéon, écrit des vers. Toutes les comédiennes ne seraient pas capables d'un si noble emploi de leurs loisirs…
Ce ne sont pas des petits vers qu'écrit Mlle Jeanne Dortzal. Le volume qu'elle vient de publier l'indique assez par son titre :
Vers l'infini… Non, ce ne sont pas des petits vers. Les rossignols n'y sifflent que par accident. Et l'on n'y cueille point, pour les effeuiller, d'insignifiantes marguerites…
Non. C'est afin d'épancher son âme que Mlle Dortzal assemble des rimes sonores. C'est pour pleurer sur un lointain amour très grand. Et ses pleurs, en vérité, sont touchants par leur sincérité et leur émotion :

Mon pauvre amour était plus grand que ma raison…


Cependant, Mlle Dortzal trouve encore dans la nature et dans la vie un intérêt bienfaisant. Elle aime la mer, les arbres, les fleurs, les parfums, l'art, les poètes, le silence et la volupté. C'est de quoi éconduire, quand il apparaît du fond du passé, le " grand désir de mort dont elle parle… Mais elle ressent vivement toutes les mélancolies, celles même qui viennent des choses. Par exemple " en apprenant que la fresque de Léonard de Vinci, Il Cenacolo, s'est écroulée ", elle pousse un cri lamentable… Heureusement, elle se console bien vite en songeant que M. Dagnan-Bouveret nous reste :

L'œuvre à recommencer, et toi pour l'accomplir…

Ce livre, où se confie une âme "accoutumée à des métamorphoses " et, par conséquent, pleine de contradictions, ce livre n'est pas monotone quant au fond. Il ne l'est pas non plus quant à la poésie, puisqu'on y sent tour à tour l'influence de Lamartine, de Musset, de Verlaine, d'Albert Samain… Et si les vers de Mile Dortzal ne sont pas tous parfaits, on y trouve généralement une sensibilité fort délicate, et un goût de rythme et de musique qui n'est pas commun. - ED. S.

COURRIER DES THÉATRES

A l'Odéon, on travaille ferme en ce moment ; on répète Arlequin roi, drame en quatre actes de M. Rodolphe Lothar, adaptation française de M. Robert de Machiels, dont la première est annoncée pour le 1er octobre. On répète en même temps, sous la direction de M. Noblet, qui en jouera, comme à la " création ", le principal rôle, Monsieur le Directeur, de Bisson. Dans cette pièce, on verra débuter une charmante actrice, récemment engagée par M. Ginesty, Mlle Jeanne Dortzal.

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France













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